Photographier les jardins de Monet

Depuis 2009, le Musée des Impressionnistes à Giverny encourage le dialogue entre la peinture impressionniste et la photographie. Aujourd’hui, il offre à cinq photographes contemporains – Darren Almond, Elger Esser, Henri Foucault, Bernard Plossu et Stephen Shore – l’opportunité de montrer leurs tirages exécutés entre 1977 et 2014.

 Stephen Shore Giverny, France, 1982 Épreuve chromogénique couleur, 91,5 × 115 cm
Par l’intermédiaire de l’artiste et de la 303 Gallery, New York © Stephen Shore, par l’intermédiaire de la 303 Gallery, New York 

Au visiteur de découvrir des résonances avec l’œuvre du maître de Giverny tout en comparant, entre eux, ces cinq regards posés sur le jardin que Claude Monet (1840-1926) destinait à devenir son motif d’inspiration artistique.

Claude Monet s’installe avec sa famille dans la maison du Pressoir à Giverny en 1883. Il a 43 ans. Il fait partie de l’avant-garde de son temps. Il a trouvé un nouvel équilibre financier, fragile, avec le monde des galeries. Il est déjà considéré comme l’un des artistes majeurs du groupe des impressionnistes et développe un style, plus original et personnel, centré sur l’art du paysage.

« Monsieur Monet que l’hiver ni
L’été, sa vision ne leurre,
Habite, en peignant, Giverny,
Sis près de Vernon, dans l’Eure. »
 Stéphane Mallarmé

 

Premier acte posé, l’artiste fraîchement arrivé à Giverny commença, par embellir le verger original en y plantant quelques fleurs « pour peindre dans les mauvais jours ».

Au début, il créée des plates-bandes avec des iris et des tulipes, plante des massifs de pivoines, de roses, intercale des clématites et des glycines sur des tuteurs ou des arceaux. Il fait rigoler des capucines jaunes orangées dans l’allée centrale.

 Bernard Plossu Chez Monet, le jardin de l’autre côté, Giverny, juin 2011 Tirage Fresson, 30 × 44,8 cm
Collection de l’artiste en dépôt au musée des impressionnismes Giverny, MDIG D 2015.1.5 © Bernard Plossu

 « Nous nous sommes tous mis au jardin ; je bêchais, plantais, sarclais moi-même ; le soir, les enfants arrosaient. A mesure que la situation s’améliorait, je m’étendais ».
Claude Monet

 

Deuxième acte, Monet se prend aux jeux et se lance dans la totale recréation de son jardin qu’il agrandit après avoir obtenu des autorisations administratives. Il fait creuser un bassin avec une prise d’eau (un bras de l’Epte). Alors, va naître,  la vision de nymphéas ombragés par des saules pleureurs et des bouquets de bambous, mais aussi des hémérocalles, des agapanthes ou des iris riants à gorges déployées,... une nature réinventée.

Monet transfigure en couleurs éclatantes avec sa peinture, son spectacle.

En 1901, il fait construire des passerelles de bois. En 1904, Monet achève la conception de son jardin qu’il va peindre, 20 ans durant, avec amour.

Darren Almond: Fullmoon Impression, 2011. C-Print, 121 x 121 cm. Darren Almond, par l’intermédiaire de la galerie Max Hetzler, Berlin /Matthew Marks Gallery, New York / Jay Jopling, White Cube, Londres 
© Darren Almond, par l’intermédiaire de la galerie Max Hetzler, Berlin / Matthew Marks Gallery, New York / Jay Jopling, White Cube, Londres

 Le jardin de Giverny est pour l'impressionniste le théâtre des saisons, des heures du jour et de la nuit et le motif essentiel de sa peinture durant les vingt-cinq dernières années de sa vie.

Il en était très fier !

Du vivant de Monet, ses amis, les peintres Gustave Caillebotte ou Pierre Bonnard, l’écrivain et critique Octave Mirbeau ou encore le « tigre » Georges Clemenceau, l’ami et biographe de l’artiste, partageaient avec lui la féerie de sa passion des fleurs et du jardinage.

« Il n’est pas besoin de savoir comment il fi t son jardin. Il est bien certain qu’il le fit tel que son œil le commanda successivement, aux invitations de chaque journée, pour la satisfaction de ses appétits de couleurs » Georges Clemenceau

Monet fut souvent pris en photo dans son jardin mais personne ne fut autorisé à peindre son jardin. Monet se réserva exclusivement le paysage qu’il avait lui-même élaboré.

C’est à Jeanne Fouchet-Nahas, commissaire de l’exposition, que nous devons ce regard photographique contemporain croisé passionnant aussi réaliste que nostalgique, impitoyable, quasi critique parfois interrogatif.

Darren Almond Civil Dawn@Giverny Winter 2, 2012 C-Print, 155 × 121 cm Darren Almond, par l’intermédiaire de la galerie Max Hetzler, Berlin / Matthew Marks Gallery, New York / Jay Jopling, White Cube, Londres
© Darren Almond, par l’intermédiaire de la galerie Max Hetzler, Berlin /Matthew Marks Gallery, New York / Jay Jopling, White Cube, Londres

Le découvrir à travers ces regards photographiques contemporains, nous ramène à la peinture du Maître et montre combien ce jardin est à percevoir comme une de ses œuvres d’art à part entière.

Et pour ceux qui voudraient  comparer allez voir et revoir les Nymphéas peints par Claude Monet, je recommande d’aller au Musée de l’Orangerie, au Musée Marmottant et au Musée d’Orsay.

 

INFOS PRATIQUES                                                                                                       
Du 31 juillet au 1er novembre 2015                                                                                  
www.mdig.fr

 

Par Caroline Benzaria

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