Sakho Bator : Economie du micro-jardin

Née à Mabo (Sénégal), Sakho Bator est Présidente de l'Association de micro-jardin 'légumes-bio' dans le quartier populaire de Cambérène à Dakar.



«Tout a commencé en 1999. Le projet d'un jardin communautaire est né grâce à la FAO, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture qui a pris en charge la formation de quelques femmes, dont moi. L'idée était de refuser les pesticides et les engrais, pour cultiver des produits de qualité. Et manger sain.
J'ai appris le métier et j'ai transmis mes connaissances à d'autres. Qui les ont retransmises elles-mêmes à d'autres... Le tout sous l'égide du ministère de la Femme. J'ai personnellement formé près de 200 personnes partout dans le pays. Et aujourd'hui, notre jardin de Cambérène compte une quarantaine de jardinières. Rien que des femmes. On a plaisir à se retrouver. Le jardin est devenu un lieu d'échanges. Tous les mois on organise une assemblée générale de l'association au cours de laquelle on fait le point des finances de l'association, nos cultures respectives, l'entretien des tables usées par l'humidité... Chacune sème ses idées.
Nos cultures permettent aux familles de vivre en quasi autosuffisance pour la consommation de légumes. Le surplus est vendu dans le quartier. Mais quand nous avons payé les semis et surtout l'eau pour les arrosages qui est notre plus grosse dépense.
Les bénéfices réalisés par nos cultures sont bien maigres. D'autant que la subvention que nous avions touchée pour les investissements initiaux s'est transformée en prêt à rembourser ! L'association du micro-jardin de Cambérène a maintenant 6 ans.


Partout a Dakar et dans le pays, on voit fleurir des jardins communautaires. Il faut dire qu'au Sénégal, où le taux de chômage est énorme, ils représentent une réelle production de richesses puisque cela assure l'autosuffisance de légumes pour les familles concernés. Dont la mienne. J'ai 5 enfants. L'aîné a 30 ans et le dernier 20 ans. Tous vivent sous mon toit. Le salaire de standardiste de mon mari qui travaille à la FAO nous permet de payer les factures et vivre, mais notre budget est serré. Je suis d'origine modeste. Mon père est mort, j'étais encore enfant. A la maison, nous étions 9 enfants. J'ai dû arrêter l'école car ma mère ne pouvait pas payer mes crayons et cahiers. Alors j'ai appris à crocheter et à l'âge de 13 ans, je vendais mes broderies en rêvant de retourner un jour à l'école. Le temps a passé et mon rêve aujourd'hui c'est d'avoir un petit commerce, ou bien quelques moutons et poules. Mais je n'ai pas d'argent pour ça.
Enfin, il y a la production de légumes bio que je ramène à la maison. Je fais ma culture sur 20 tables. Sur l'une d'elles, j'ai récolté dernièrement 7 kg de pommes de terre ! De temps en temps, mes enfants s'intéressent au jardinage. Surtout pour la menthe que l'on met dans le thé.
Avant le micro-jardin, nous les femmes étions enfermées dans nos tâches ménagères. On s'occupait de nos enfants, on mangeait, on dormait... Rien d'autre. Maintenant, nous partageons le bonheur de construire notre avenir et celui de nos familles. Le regard que les hommes portent sur nous a changé aussi. C'est une grande fierté.»


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