Aldo Naouri - Fête du Livre

Invité de la Fête du Livre de Levallois-Perret, le 10 octobre 2010

Pédiatre formé à la psychanalyse, né en 1937, Aldo Naouri est auteur de nombreux ouvrages publiés au Seuil et aux éditions Odile Jacob. Le 10 octobre prochain, il sera présent à la 57e Fête du Livre organisée par la WIZO, à la Mairie de Levallois-Perret. Toutpourlesfemmes.com a donc rencontré Aldo Naouri pour évoquer les ouvrages qu'il a écrits mais aussi ceux qu'il aime lire.

Toutpourlesfemmes.com : Pourquoi vous êtes-vous lancé dans l'écriture ?

Aldo Naouri : En tant que citoyen, je me suis senti contraint de prendre la parole pour donner mon avis sur l'évolution de la société. Dans mon premier livre, L'enfant porté, paru en 1982, j'ai essayé de comprendre comment faire évoluer le travail du médecin. A l'époque où j'ai commencé à écrire le livre, les fléaux qui menaçaient la santé des enfants avaient disparu. La demande des parents avait changé : il ne s'agissait plus de maintenir les enfants en bonne santé mais de les aider à devenir des adultes de qualité. Et comme ce livre a été un succès éditorial, je me suis senti la possibilité d'aller un peu plus loin...

Aldo Naouri



TPLF : Il semble même que vous soyez allé beaucoup plus loin en consacrant la plupart de vos ouvrages à la place du père ? Pourriez-vous nous expliquer ce cheminement qui a déchaîné les passions ?

A.N: En 1985, quand j'ai publié Une place pour le père au Seuil, j'ai démontré qu'une bonne partie des problèmes physiques et psychologiques des enfants proviennent du fait que le père a « été démissionné », autrement dit, abandonné par le contexte social qui lui a retiré son appui. Or, chaque fois que l'on « remet du père » dans la famille, le problème est résolu. Ce livre a été très bien accueilli par la presse mais pas par l'éditeur ! Mon ouvrage suivant, Parier sur l'enfant montre comment les sociétés expulsent les pères, ce qui a valu une vive réaction du lectorat. J'ai arrêté d'écrire jusqu'à ce que j'aie reçu une commande de guide pour les parents, L'enfant bien portant. Dans le dernier chapitre, intitulé 'Construire une famille', j'évoquais la nécessité de redonner sa place au père, mais l'éditeur a supprimé cette partie du livre. Cela m'a donné l'occasion de publier ce chapitre interdit, chez un autre éditeur, en un ouvrage intitulé Le couple et l'enfant.

TPLF : En fait, vos livres découlent les uns des autres ?

A.N: Effectivement, après Le couple et l'enfant, j'ai publié Les filles et leurs mères, un gros succès éditorial, dans lequel il est à nouveau question de la place du père. Dans ce livre, j'explique une fois de plus qu'un père ne peut occuper une place que s'il y est appelé par la mère de l'enfant et que, comme cela a été le cas pour le grand-père maternel, il se trouve en concurrence frontale avec la grand-mère maternelle. Et je tire mes arguments de la clinique médicale, mais aussi de la psychanalyse, de la sociologie et de la politique. J'ai poursuivi avec Les pères et les mères.

TPLF : A première vue, Adultères que vous avez publié juste après Les pères et les mères ne semble pas être un livre de pédiatrie...

A.N : C'est un livre de pédiatre qui fait suite à Les filles et leurs mères ! Dans Adultères, je montre que l'individu qui cède à l'adultère cherche en fait à retrouver dans les bras de sa maîtresse ou de son amant le côté comblant des bras de la mère de son petit âge. Adultères a nuit à son titre et pourtant, j'ai refusé de le changer. On me disait qu'avec un titre pareil, lire cet ouvrage au lit ou dans le métro poserait problème, or lire Crimes et Châtiments n'en pose aucun. Si l'homme a maîtrisé sa pulsion meurtrière, on ne peut pas en dire autant de sa pulsion sexuelle, encouragée par la société de consommation, qui ne donne aucune limite à la satisfaction. Non seulement les divorces, familles monoparentales et recomposées augmentent, mais l'éducation en pâtit car on donne aux enfants tout ce qu'ils demandent. C'est de ces observations qu'est né mon dernier essai Eduquer ses enfants, l'urgence d'aujourd'hui. Il m'a valu beaucoup de courrier !

TPLF : Justement ! Qui vous écrit ? Qui lit vos livres ?

A.N : J'ai un lectorat multiple : des parents, des curieux, des professionnels... Mon dernier livre, sorti en mai chez Odile Jacob est la réédition, très remaniée, du guide L'enfant bien portant, initialement publié au Seuil. Ce guide contient de nombreuses informations que les pédiatres ne connaissent pas. Mes publications me valent beaucoup d'emails et de lettres car je traite des questions qui intéressent un public très large et divers.

TPLF : Quand on consulte votre site web, on découvre que vos livres sont traduits dans de nombreuses langues étrangères ?

A.N : Les pères et les mères est traduit en anglais. D'autres de mes ouvrages sont disponibles dans toutes les langues latines, en allemand, néerlandais, portugais, coréen... D'ailleurs, je donne des conférences dans le monde entier.

TPLF : A lire vos livres, on sent que l'écriture occupe une place importante dans votre vie. Ecrivez-vous tous les jours ?

A.N : Non, j'écris « par crise », sur mon ordinateur. C'est une énorme souffrance, un état étrange. C'est un plaisir à la hauteur de cette souffrance quand le résultat est obtenu : je suis un perfectionniste ! On me reproche parfois d'écrire de façon littéraire...

TPLF : Nos lecteurs aimeraient certainement savoir quelle est votre oeuvre de littérature préférée ?

A.N : Je suis un lecteur boulimique mais je n'hésite pas à élire Madame Bovary de Flaubert. C'est une oeuvre parfaite à tous les niveaux ! J'avais failli la lire depuis le CM2 à plusieurs reprises mais sans y parvenir jusqu'au jour où, à l'âge de 44 ans, alors que je conduisais ma voiture dans ma tournée de visites, j'ai entendu un texte à la radio. Saisi par sa beauté, je me suis garé pour l'écouter et découvrir son titre. C'était le passage de la mort d'Emma. Je suis allé immédiatement à la bibliothèque et ai annulé mes consultations pour me mettre à lire Madame Bovary.

TPLF : Et pour les enfants qui découvrent l'univers de la lecture, quels livres vous semblent incontournables ?

A.N : Pour les plus jeunes, je conseille les publications de l'Ecole des Loisirs, ma fille, Agnès Desarthe, y publie ses ouvrages. Et pour les plus grands, à partir de la 5e, je recommande les Maigret de Georges Simenon. A mon sens, cet auteur aurait mérité un Prix Nobel !

TPLF : Pour clore cette interview, impossible de résister à la tentation de savoir si vous écrivez un nouveau livre en ce moment...

A.N : Je n'en parle jamais avant que ce soit fini !


Site web d'Aldo Naouri
-www.aldonaouri.com

Infos pratiques Fête du Livre de la WIZO à Levallois-Perret
-Dimanche 10 octobre de 13h30 à 18h30
-Mairie de Levallois, Place de la République
-Présence de nombreux écrivains dont Françoise Dorin, Alain Decaux, Marek Halter...
-Stand livres pour enfants, salon de thé et conférences.
-Entrée : 5 €



Par Frédérique Alfassa-Larsonneur

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