Espace culturel Louis Vuitton : « Ecritures silencieuses »

Des « écritures silencieuses » : un concept à la fois évident et étrange. Il désigne ici les signes gravés sur le bois des tablettes Rongo Rongo. Découvertes en 1864 sur l'Ile de Pâques, elles ont résisté à toutes les tentatives de déchiffrement. Ce mystère a inspiré le titre et le thème de l'exposition présentée à l'espace culturel Louis Vuitton jusqu'au 23 août. 

Espace Louis Vuitton, Alexandra Mendès-France

Derrière le magasin de la marque des Champs-Elysées, un ascenseur silencieux et noir, oeuvre de l'artiste danois Olafur Eliasson, vous amène au septième étage de l'immeuble. Les tablettes vous attendent devant sa sortie. Les voir est un privilège : c'est, paraît-il, le deuxième lieu où elles sont exposées au public, après le Vatican (même si d'autres tablettes du même style ont voyagé dans le monde). Elles sont trois, de petite taille, entièrement couvertes de signes simples et stylisés, évoquant des animaux, des êtres humains, des plantes ou des figures plus énigmatiques...

A la fois primitives et modernes, les tablettes sont ici le seuil d'un univers où le signifié s'efface derrière le signifiant, le sens derrière le tracé. Une dizaine d'oeuvres d'artistes contemporains conçues et réalisées autour des notions d'empreinte, de trace, de signe et d'écriture sont en effet présentées dans cet espace de 400 m2. Une découpe de branche dorée à la feuille (Giuseppe Penone), une projection d'algorithmes de mots dans l'espace (Charles Sandison), des tranches de livres servant d'écran de projection (Ni Haifen), un alphabet latin prolongé et réinventé (Claude Closky), des graffitis composant des portraits (collectif d'artistes Sun7)...

Chaque visiteur perçoit ces oeuvres, et d'autres encore, à sa façon. Les signes, lettres, chiffres et mots sont déconstruits, restructurés, réutilisés. Nos clés habituelles de compréhension ne fonctionnent plus. Notre sensorialité, endormie par l'habitude et la répétition, est ainsi invitée à se réveiller, à laisser entrer de nouvelles perceptions. Une ouverture au changement. Au mouvement. A la vie.

A noter : la Maison Louis Vuitton soutient la création en 2009 d'une fondation Rapa Nui (1), pour la protection du patrimoine, la transmission de l'héritage et le développement durable de l'Ile de Pâques. Cette action culminera en 2010 avec l'odyssée d'une statue géante « Moai » de l'île, âme au coeur de Paris, restaurée, choisie et envoyée par les peuples Rapa Nui comme messager de paix à travers l''espace et le temps.

(1) Ethnie polynésienne autochtone de l'Île de Pâques

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Par Chloe Braillon