De la porcelaine à la révolution de velours
La Saxe évoque surtout la porcelaine. Mais ce Land de l'Allemagne de l'Est renferme bien d'autres richesses que cet « or blanc ». L'art moderne et l'industrie s'y conjuguent avec des traditions soigneusement préservées, voire restaurées.
Le Palais du Zwinger à DresdeEn Saxe, tout est au rendez-vous : musique, architecture, art moderne, industrie, nouvelles technologies, quartiers branchés, vieilles villes médiévales... Le dynamisme économique y a toujours fait bon ménage avec une intense vie culturelle, grâce à une alliance particulièrement féconde entre les arts, les sciences et l'enseignement. Symboliquement, la porcelaine européenne est née en Saxe dans les années 1710, quand le chimiste Böttger réussit à produire une porcelaine d'une extraordinaire blancheur... sous la contrainte du Prince électeur et duc de Saxe, Auguste Le Fort. Ce dernier fonda à Meissen une manufacture qui acquit une réputation mondiale.
Frédéric-Auguste Ier, dit Le Fort, gouverna le Duché de 1694 à 1733 et devint également roi de Pologne. Grand protecteur des arts et fervent admirateur de Louis XIV, il voulut donner à sa capitale une splendeur toute française. Il en fit la Florence de l'Elbe. S'y épanouirent ainsi le baroque et le rococo dits « classiques » allemands, illustrés notamment par le célèbre palais du Zwinger. La Saxe, déjà dotée d'un tissu productif, culturel et universitaire rare, conquit ainsi un prestige presque égal à celui de la France - la cour de Saxe fut qualifiée par Voltaire « la plus brillante d'Europe après celle de Louis XIV ».
Dresde, la ville-Phénix
Ce prestige revient au goût du jour depuis la réunification allemande. Il faut dire que Dresde s'est fait Phénix renaissant des cendres causées par les bombardements de 1945, surtout depuis la réunification allemande. Des efforts de restauration uniques en leur genre ont permis de reconstruire des fleurons comme le Palais Zwinger, délicat ensemble baroque comportant un merveilleux pavillon et un arc de triomphe unique au monde, l'opéra Semper, la Frauenkirche, vaste église évangélique baroque (terminée en un temps record en majorité grâce à des dons privés) et la Kanzleihaus, remarquable palais Renaissance abritant aujourd'hui le siège épiscopal.
Collection de la voûte verte de DresdeAu Château de la Résidence, on peut admirer les fastueuses collections des princes de Saxe. La collection de la 'Voûte verte' comprend 3000 objets précieux, chefs-d'œ,uvre de joaillerie et d'orfèvrerie, rassemblés par Auguste Le Fort. Ce nom original est dû au lieu d'exposition initial : une pièce du château caractérisée par sa couleur verte, sorte de musée avant l'heure, endommagée en 1945 et réouverte en deux parties en 2006. On peut aussi admirer à Dresde les 600 pièces d'art ottoman de la Chambre turque ainsi que les 25 000 porcelaines d'Auguste Le Fort, encore et toujours...
Sur les routes de Saxe
Au-delà de Dresde, la Saxe abrite une multitude de châteaux et parcs magnifiques. Au nord de la capitale, Moritzburg, ancien rendez-vous de chasse, et à l'est Pillnitz, ancienne résidence royale, sont des chefs-d'œ,uvre de l'architecture baroque saxonne. Görlitz, la ville la plus orientale d'Allemagne, abrite des monuments gothiques et Renaissance uniques en leur genre. La Route saxonne du Vin (Sächsische Weinstraße) permet de découvrir les vignobles de Saxe qui remontent au XIIe siècle, sur 60 km à travers des villages de la vallée de l'Elbe, de Pirna à Diesbar-Seusslitz. Meissen, adorable petite bourgade médiévale, mérite le détour pour sa seule manufacture de porcelaine mondialement connue. Freiberg, ancienne marche de l'empire romain, est une ville à part. Sa cathédrale abrite notamment la magnifique chapelle funéraire des Electeurs de Saxe, et également l'un plus grands, des plus anciens et des meilleurs orgues du monde, réalisé par Gottfried Silbermann.
Le château de Moritzburg En matière de culture, la Saxe, patrie de Richard Wagner et de Jean-Sébastien Bach, met l'accent sur la musique, incarnée par l'Opéra Semper à Dresde qui compte parmi les meilleurs du monde. Leipzig, justement célèbre pour l'orchestre symphonique de sa Gewandhaus, consacre chaque année un festival à Bach, qui fut pendant 37 ans maître de chapelle de son église Saint-Thomas. Cette dernière héberge toujours le célèbre et très ancien chœ,ur de garçons Thomanerchor. Sur le parvis de l'église, le 'Musée Bach' abrite des archives du grand compositeur, dont une partition originale, absolument exempte de toute correction...
La Saxe, un Etat d'espoir
Mais la Saxe est aussi et avant tout une région qui a su s'adapter au monde moderne. Sa capitale économique, Leipzig, est également une métropole culturelle extrêmement dynamique. La Spinnerei, ancienne filature de coton abrite aujourd'hui des galeries et plus de 100 ateliers d'artistes. C'est dans cet endroit unique par ses dimensions, ses lumières, son esprit aussi, que naquit le succès de l'école de Leipzig et de son représentant le plus célèbre, le peintre Neo Rauch, à qui le Musée des arts plastiques de la ville consacre une rétrospective pour son cinquantième anniversaire. Leipzig est aussi une ville de la littérature, du livre et des médias. Sa foire du livre est chaque année un vaste forum de rencontres entre lecteurs, auteurs et éditeurs, axé sur les débuts littéraires et sur la littérature de l'Europe centrale et de l'Est. Enfin, c'est dans les studios du centre médiatique de Leipzig que le film de Michael Haneke « Le ruban blanc », vit le jour en 2008.
A noter enfin : pour ceux qui l'ignorent, Leipzig puis la Saxe furent aussi le point de départ de la révolution pacifique de 1989. Kurt Masur, directeur du Gewandhaus, y apporta une active contribution. Chaque année, la « nuit des bougies » commémore cette lueur historique d'espoir...
Exposition à la Spinnerei de LeipzigRendez-vous 2010
Festival Jean-Sebastien Bach
Où : Leipzig
Quand : du 11 au 20 juin 2010
Site internet : www.bach-leipzig.de
Exposition rétrospective « Neo Rauch Begleiter »
Où : Musée des Beaux-Arts de Leipzig
Quand : jusqu'au 31 août 2010
Site internet : www.neo-rauch-ausstellung.de
Sites internet
Monuments, musées, collections et expositions de la Ville de Dresde :
http://www.skdmuseum.de/de/startseite/index.html
Site français de l'office du tourisme allemand :
http://www.allemagne-tourisme.com/
Histoire de la Saxe
La Saxe a connu une histoire mouvementée. Situé au cœ,ur de l'Europe, le Land a gagné et perdu plusieurs fois au cours des siècles de grandes parties de son territoire et de sa population. Erigée en duché par Louis le Germanique en 843, la Saxe est, vers 1400, l'Etat le plus riche d'Allemagne grâce notamment aux mines d'argent du sud de l'Erzgebirge, et connaît une grande prospérité culturelle sous le règne d'Auguste II, dit le Fort (XVIIe et XVIIIe siècles).
Napoléon Ier érige en royaume le duché de Saxe dans le cadre de son alliance avec le duc Frédéric-Auguste III. En 1815, une grande partie du territoire du royaume est cédé à la Prusse pour constituer la Saxe prussienne. Le royaume de Saxe ainsi diminué subsiste jusqu'à la chute de l'Empire allemand en 1918.
La monarchie s'effondre pour laisser la place à un État libre de Saxe qui fut intégrée au Troisième Reich hitlérien puis à la République démocratique allemande jusqu'à la réunification de l'Allemagne en 1990. La Saxe se dote d'un système républicain dès 1919, puis intègre la RDA à l'issue de la deuxième guerre mondiale, après avoir connu une décennie de dictature nazie.
Ce fut également en Saxe que commença la révolution pacifique de 1989. Les « manifestations du lundi » eurent lieu à Leipzig ainsi qu'à Dresde peu de temps après. Elles ont joué un rôle de premier plan dans le processus de la réunification. Après la chute du régime est-allemand, la Saxe fut le premier des nouveaux Länder à se doter de sa propre constitution.
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