Lang Lang: Chopin, concertos pour piano

Un album Deutsche Grammophon

Deutsche Grammophon a sorti récemment un album dans lequel Lang Lang interprète deux concertos pour piano de Chopin avec le Philharmonique de Vienne sous la direction de Zubin Mehta.
Le jeune prodige chinois y déploie sa maîtrise exceptionnelle du piano et sa faculté à entrer avec élégance et virtuosité dans l'univers de la musique romantique.




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Au mois de juin 2008, Lang Lang se trouve à Vienne, et interprète les deux Concertos pour piano de Chopin avec l'Orchestre Philharmonique de Vienne sous la direction de Zubin Mehta. Deutsche Grammophon sort l'album de cette soirée du 21 juin 2008. Événement attendu d'un grand pianiste d'aujourd'hui, fin musicien qui met son art d'interprète au service de ces deux concertos emblèmes de la musique romantique. 'J'ai voulu refléter la chaleur et l'enthousiasme de Chopin, et avant tout sa poésie. Mais j'ai également décidé de faire cet enregistrement parce que je voulais explorer les possibilités du cantabile', explique Lang Lang dans son interview réalisée par Michael Church pour le texte de présentation du disque, interview dont nous publions des extraits ci-dessous.


Interview

Lang Lang répond aux questions de Michael Church sur son premier disque consacré à Chopin.

Michael Church: Qu'est-ce qui vous a incité à enregistrer les concertos de Chopin?

Lang Lang:
J'essaie toujours de toucher le jeune public, et Chopin est pour cela le compositeur idéal. Sa musique est si universelle que même les gens qui n'aiment généralement pas la musique classique aiment Chopin. Ils sont sensibles à son romantisme et à sa noblesse. Mais si on le joue de manière trop romantique, ça devient une chanson pop —, le classicisme vous évite cet écueil. Chopin représente l'équilibre parfait, comme, d'une manière différente, Mozart, son idole. Cela dit, je trouve que c'est très difficile de parler de ce compositeur tant il relève du domaine des sentiments, de l'instinct. Il vous oblige à réagir rapidement à ce qui vient d'être exprimé musicalement, à penser en improvisateur.

M.C.: Comment avez-vous travaillé ces concertos ?

L.L.: J'ai vécu tant d'années avec eux que je les ai maintenant dans le sang. Le Fa mineur est le premier concerto que j'ai joué, lorsque j'avais treize ans, avec le Philharmonique de Moscou lors de la finale du Concours Tchaïkovski pour jeunes musiciens. Je l'ai choisi comme morceau de concours parce que je l'adorais. Il signifiait beaucoup pour moi, même si à treize ans j'étais trop jeune pour comprendre le drame que représentait pour Chopin l'amour pour cette jeune fille qui ne le lui rendait pas. Mon père m'a dit de ne pas penser à la situation affective, de songer simplement à un beau paysage —, ou à ma mère qui me manquait ! ça a très bien marché: j'ai gagné le concours.

M.C.: En quoi ces concertos différent-ils l'un de l'autre selon vous ?

L.L.
: Dans le Fa mineur, c'est comme si le protagoniste désirait quelqu'un, il paraît encore timide, dans le Mi mineur, qui est beaucoup plus brillant, il a déjà trouvé cette personne. Et cette différence se reflète dans les danses sur lesquelles sont construits les deux finales: la mazurka, dans le Concerto en fa mineur, est gracieuse, tandis que la cracovienne, dans le Mi mineur, écrit en second, est ouverte et débridée. Il y a donc une évolution.

M.C.: Qui est pour vous le pianiste idéal, sur le plan de l'interprétation ?

L.L.: Artur Rubinstein. Très naturel, très passionné, et surtout très chaleureux. Par l'intermédiaire de Daniel Barenboïm, avec qui il a joué, j'ai d'ailleurs pu bénéficier de sa sagesse sur un problème particulier. La chose la plus difficile, dans cette musique, est de régler son usage du rubato sur la structure de la sonate : le fait est qu'on risque facilement, avec de fréquents rubatos, de jouer de plus en plus lentement. Rubinstein a montré à Barenboïm qu'on peut faire autant de rubato qu'on veut avec la main droite, pourvu que la main gauche reste régulière, de sorte que le rythme de la main droite y revienne toujours. Cette idée m'a beaucoup aidé.

M.C.: Comment voyez-vous la relation entre le piano et l'orchestre dans ces œ,uvres?

L.L.: Beaucoup plus franche que dans les concertos de Rachmaninov ou de Prokofiev. Ici, c'est le piano qui commande, c'est toujours le guide. Mais c'est tout de même un travail d'équipe, et, pour l'orchestre, c'est plus difficile qu'on ne pourrait le penser. Dans les finales, il n'est pas aisé d'accompagner le piano et de garder le rythme et la légèreté de la danse, la pulsation.

M.C.: Quel but espérez-vous avoir atteint avec cet enregistrement ?

L.L.: Il existe déjà de grands enregistrements, notamment celui de Zimerman, ou ceux de Martha Argerich, d'Ivo Pogorelich ou de Murray Perahia. Tous ceux qui enregistrent Chopin disent qu'ils se sentent proches de lui, et c'est aussi mon cas. Cet enregistrement est très personnel pour moi, mais ceux d'autres pianistes sont sans doute tout aussi personnels pour eux. J'ai voulu refléter la chaleur et l'enthousiasme de Chopin, et avant tout sa poésie. Mais j'ai également décidé de faire cet enregistrement parce que je voulais explorer les possibilités du cantabile.

© 2008 Deutsche Grammophon GmbH, Hamburg. Extraits du texte de présentation du disque Deutsche Grammophon (Traduction: Dennis Collins).


Biographie

Né à Shenyang (Chine) en 1982, Lang Lang commence ses études de piano, à trois ans. En 1987, il remporte le premier prix au Concours de piano de Shenyang et donne ensuite son premier récital en public. Les années se suivent et les prix se ressemblent : toujours le premier. En juillet 2002, au festival du Schleswig-Holstein, il est le premier lauréat au Prix Leonard Bernstein, décerné en reconnaissance de son talent musical exceptionnel. Il joue dans les salles les plus prestigieuses : Carnegie Hall, Grande Salle du peuple à Pékin, Albert Hall, Wigmore Hall de Londres, Kennedy Center de Washington, Auditorium du Louvre à Paris. Il accompagne également, entre autres, le Los Angeles Philharmonic (Marin Alsop), le London Philharmonic (Vladimir Jurowski), l'Orchestre de Paris (Eschenbach), la Staatskapelle de Berlin (Barenboim), ou le Mariinski (Gergiev). Lang Lang est aussi l'interprète d'une partie des morceaux au piano du film 'The Painted Veil' ('Le Voile des illusions') qui sort en France en mars 2007 et pour lequel le compositeur français Alexandre Desplat a remporté le Golden Globe de la meilleure musique originale. Sur son album sorti le 27 août 2007, il interprète les 'Concertos pour piano n°1 et 4' de Beethoven, en compagnie de l'Orchestre de Paris. Il a participé l'été dernier à la cérémonie d'ouverture de J.O. de Pékin.


- Frédéric Chopin (1810-1849)
- Concerto pour piano n° 2 en fa mineur, op. 21
- Concerto pour piano n° 1 en mi mineur, op. 11
- Lang Lang, piano
- Orchestre Philharmonique de Vienne
- Direction Zubin Mehta
- Sortie janvier 2009



Par Nicole Salez

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