Pour sa vingt cinquième édition, du 11 au 25 janvier 2015, Nîmes la flamenca fera son festival aux quatre coins de la ville, au théâtre Bernadette Lafont pour les vedettes incontestées, à l'Odéon scène plus intimiste pour artistes plus modestes, à l'Institut Emmanuel d'Alzon pour les concerts acoustiques et à la Paloma pour une grande soirée consacrée aux familles gitanes du delta du Rhône.
Nîmes et le flamenco célèbrent leurs noces d'argent, vingt-cinq ans d'une union passionnelle et durable. Nîmes, l'espace de quelques jours, devient Nîmes l'Espagnole, rendez-vous incontournable de la société la plus huppée du flamenco.
Cette année encore, les figures incontestées de la danse en particulier ont répondu présent, avec, par ordre d'apparition d'entrée en scène, Israël Galvan, Belen Maya, Joachim Grilo et Rocio Molina, qui présentent leurs derniers spectacles. Israël Galvan propose Fla.Co.Men, une co-production avec le théâtre Bernadette Lafont de Nîmes ; Rocio Molina présente elle-aussi une co-production avec le théâtre, Bosque Ardora. Pour mémoire, l'année dernière à la même époque, elle était artiste en résidence. Tout à la fois Diane Chasseresse et petit être pourchassé, forte de cette ambiguïté, elle affronte sept hommes, dont les danseurs Eduardo Guerrero et David Coria, le chanteur José Angel Carmona, le guitariste Eduardo Trassierra. C'est le tribut du théâtre Bernadette Lafont pour honorer son titre de Scène nationale de la danse contemporaine. 
Rocio Molina dans Bosque Ardora ©Rafael Gavalle
Quant à Belen Maya, devancière dans le rapprochement entre danse contemporaine et flamenco, avec Los Invitados, elle rend un vibrant hommage au chant qui est le fondement même du flamenco. Pour l'accompagner, elle a invité trois chanteurs magnifiques, José Anillo, David Lagos et Tomas de Perrate, une chanteuse à la voix puissante et fragile, qui commence à sortir de l'ombre, Gema Caballero, et une danseuse aussi gracieuse qu'inventive, pleine d'espièglerie, Patricia Guerrero, et, pour soutenir l'ensemble deux guitaristes au jeu épuré, classique et précis, Rafaël Rodriguez El Cabeza et Javier Patino. Avec ces Invitados, Belen Maya a remporté l'an dernier le grand prix de la critique du festival de Jerez et enthousiasmé le public de la Biennale de Séville.
Belen Maya © Luis Castilla
Un partenariat, reconduit pour la 4e année consécutive avec la région d'Extremadure, permettra de mesurer la qualité du flamenco extremeño, version féminine. Il y a deux ans, les festivaliers avaient découvert Celia Romero, à peine âgée de 18 ans, auréolée de sa victoire au concours de La Union. Sans doute un peu frêle pour le grand théâtre, elle revient sur la scène plus intimiste du théâtre de l'Odéon. Raquel Cantero, chanteuse, et Zaira Santos, danseuse, viennent parfaire ce cartel.
Celia Romero © Emilio Garcia
Toujours à l'Odéon, Patrice Thibaud, comédien en résidence permanente, présente un OVNI artistique, Franito. Patrice Thibaud a conçu ce spectacle pour et autour d'un danseur exceptionnel, aussi talentueux que discret, Fran Espinosa. Fran est de Cordoue, il n'a pas la silhouette convenue du bailaor, longue et fine, il est petit et râblé, mais émane de lui grâce et puissance. Quand le comédien a vu Fran, il n'a pas hésité et a conçu ce spectacle. Cedric Diot, l'un des guitaristes attitré du danseur, complète le trio.
Ce festival serait très incomplet si le chant ne se taillait pas une place de choix. Deux monstres du cante seront sur la scène du théâtre Bernadette Lafont. Le chanteur El Pele, accompagné par Manolo Silveria, est un gitan cordobes, fantasque, à la voix puissante, d'une exigence rare avec lui et ceux qui l'entourent ; il déteste la médiocrité. C'est l'un des derniers « ogres » du cante. Quand il veut, il embarque toute une salle avec lui et il est difficile de lui faire quitter la scène. 
El Pele à Paris en 1999 © René Robert
Ojala ! L'autre sera Mayté Martin qui chante « Por los muertos del cante ». Elle salue dans ce spectacle les grands artistes aujourd'hui disparus, qui l'ont émue ou influencée. Elle met au service de la Niña de la Puebla, de Manuel Torre, de la Niña de los Peines, figures tutélaires du chant, sa voix veloutée, à la légère raucité, qu'elle utilise avec facilité ; mellismes et acrobaties vocales ne lui font pas peur. Mais sa sensibilité à fleur de peau modère naturellement ces effets et donne à son chant une rare intensité. Pour l'accompagner, ses guitaristes fidèles, José Luis Montón et Juan Ramón Caro. Ils sont tous les trois originaires de Barcelone.
Mayte Martin © Jean-Louis Duzert
A l'institut Emmanuel d'Alzon, à noter une abondance de concerts acoustiques, le régal des aficionados. A ne pas manquer le mano a mano de deux géants de la guitare, Manolo Franco et Rafaël Rodriguez, le récital du cantaor sévillan Miguel Ortega, et celui de Los Pañeros, artistes non professionnels, gardiens de la tradition d'Algesiras. Ils ont été dénichés par le guitariste Antonio Moya qui les accompagnera.
Les familles gitanes du delta du Rhône auront scène ouverte, à Paloma, lors d'une très longue soirée d'art et de fête.
On ne saurait parler de cette 25e édition du festival, sans évoquer le guitariste Paco de Lucia disparu prématurément l'année dernière. Une grande soirée sera donnée en son honneur. C'est Niño Josele, digne héritier du Maestro, qui aura carte blanche pour cet hommage. Il sera accompagné par José María Velásquez-Gaztelu, encyclopédie vivante du flamenco.
Ce festival s'annonce très divers et très ouvert, allant du flamenco traditionnel au flamenco plus contemporain. Quelques surprises et curiosités viendront pimenter la quinzaine nîmoise. Et comme chaque année, autour des concerts, un cycle de conférences, des after et un festival off. Une belle manière de réchauffer les semaines traditionnellement les plus froides de l'année.
Renseignements et location sur le site du théâtre Bernadette Lafont http://www.theatredenimes.com/fest-35-festival_flamenco_2015.html
Par Marie Ningres
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