Adichie, l'héroïne de la littérature nigériane

Après L'Hibiscus pourpre, L'Autre Moitié du soleil et Autour de ton cou, un recueil de nouvelles, la romancière nigériane publie son troisième roman. Un réalisme décoiffant.

 


Bienvenue chez les Americanah. Ainsi sont surnommés les Nigérians qui ont tenté leur chance dans le pays d’oncle Sam avant de revenir au pays des Super Eagles pour réaliser leurs rêves d’idéalistes et faire fortune.

« En descendant de l’avion à Lagos, j’ai eu l’impression d’avoir cessé d’être noire »,

commence Ifemelu, une jeune femme nigériane qui décide de quitter le pays pour suivre des études à Philadelphie, en pensant que son amour de jeunesse, Obinze, la rejoindrait après avoir réglé quelques détails administratifs. Mais rien ne se passe comme prévu.

« Philadelphie avait l’odeur du soleil d’été, de l’asphalte brûlant, de la viande qui grillait dans les camions-cuisine garés au coin des rues, des étrangers et étrangères à la peau brune tassés à l’intérieur » (p. 142).

A la fois enthousiaste et désabusée, Ifemelu tente de survivre dans ce nouvel environnement et de s'adapter à l’American Way of Life. C’est avec un humour caustique qu’elle dépeint l’immersion américaine, la conscience de la négritude et toutes ses subtilités. Devenue une véritable héroïne de la blogosphère, cette fine observatrice des différences culturelles entre les noirs africains et les noirs américains décide de revenir au pays quinze ans plus tard.

Portrait de Chimamanda Ngozi Adichie


L’histoire d’Ifemelu n’est pas un cas isolé.
Le Nigeria des années 1990 perd ses forces vives intellectuelles, les étudiants diplômés mais sans avenir dans un pays marqué par la corruption, l’instabilité politique et les difficultés économiques. Convaincus que leur réussite est ailleurs, ces jeunes adultes aisés partent étudier ou travailler aux États-Unis ou en Grande-Bretagne. Clandestinité, misère, trafic de papiers, mariages blancs, prison : ces classes moyennes africaines sont confrontées à une réalité toute autre.

 

A travers ses personnages, attachants et généreux, Chimamanda Ngozi Adichie dissèque son expérience personnelle avec un impressionnant sens du détail pour dresser le portrait d’une Amérique troublée par le racisme et les difficultés d’intégration.

Un roman engagé, dense et plein d’humour qui fait la part belle aux femmes et à une histoire d’amour impossible.


Les incontournables d’Adichie 

A écouter :

We Should all be feminists. Chimamanda Ngozi Adichie, TEDxEuston.

Fawless (2013). Beyoncé ft. Chimamanda Ngozi Adichie.

A lire :

Americanah (2015). Trad. de l’anglais (Nigeria) par Anne Damour. Gallimard, “Du monde entier”, 528 pages, 24,50 € (disponible au format numérique ici pour 17,99 €).

Nous sommes tous des féministes suivi de Les marieuses (2015). Trad. de l’anglais (Nigeria) par Mona de Pracontal et Sylvie Schneiter. Gallimard, « Folio », 96 pages, 2 €.

Autour de ton cou (2013). Trad. de l’anglais (Nigeria) par Mona de Pracontal. Gallimard, « Du monde entier », 304 p., 22,50 €.

L'Hibiscus Pourpre (2006). Trad. de l’anglais (Nigeria) par Mona de Pracontal. Le Livre de Poche, 352 pages, 6,60 €.

Par Adeline Rajch

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