« Sous les pas des mères » de Mounira Chatti

La condition féminine est au cœ,ur du premier roman de Mounira Chatti que les Éditions L'Amandier présentent à l'occasion du Salon du Livre de Paris. Une écriture subversive, magnifiquement poétique, promise à concourir au Fémina.



Quelque part dans un village au cœ,ur du Maghreb, deux clans s'affrontent. Avec le souffle épique des grands récits mythologiques, « Sous les pas des mères » donne la parole à une multitude de personnages qui livrent des bribes de l'histoire de la famille.

Il y a d'abord la figure fantomatique de Yagouta, l'aïeule sacrifiée le soir de ses noces, coupable de ne pas avoir saigné. Amina, la tante sans fils et sans foyer. Zina l'intouchable « matrice des mâles ». Khawla, l'ogresse, mangeuse d'hommes et d'enfants. Mélia, l'étudiante exilée en France. Béchir, son père, l'instituteur épris de justice et tyran domestique. Nejma, sa femme, illettrée, victime et bourreau à la fois. Tariq, le frère schizophrène. Wassila, la vierge folle... Et bien sûr, l'ombre tutélaire et terrorisante des patriarches.

Tous ces personnages sont loufoques, pathétiques, ambivalents et attachants , tous à des degrés divers sous la triple houlette d'Allah, de l'Hyper-Président, et des « Djiins » (esprits).

Choral, hybride, jouant avec les temps, cassant linéarité et chronologie, ce roman tient de l'archéologie, du palimpseste. Emergent la mémoire des paroles censurées, la trace des souvenirs honteux.

Bousculant les tabous ( sexualité, laïcité, antisémitisme, maladie mentale), ce roman à l'écriture poétique a pour thème central la condition des femmes , sorte de baromètre mesurant l'état de santé et de développement social du monde arabo-musulman contemporain. Si elle dénonce l'obscurantisme et la bêtise, l'auteure par la voix porteuse d'espoir de Mélia, s'attache à mettre en exergue la beauté magique et la richesse de la culture du Maghreb. Une culture métisse, complexe, où le berbère se mêle au français et à l'arabe. Celle où l'islam non soumis à une lecture figée des textes sacrés est une « exigence de savoir, d'intelligence et de progrès ».

Avec la force des tragédies grecques, « Sous les pas des mères » propose plusieurs niveaux de lecture où Kafka fait écho à Bettelheim, Freud, Kateb Yacine, aux « Mille et une nuits » ou encore à la métaphore du rizhome chère à Deleuze et Guattari.

Aussi, Henri Citrinot, (Éditions L'Amandier) ne s'y est pas trompé lorsqu'il parle d'un « véritable choc littéraire » lors de la découverte de ce premier opus. L'éditeur a tant de foi dans ce livre qu'il projette de le présenter au Fémina. Gageons qu'il sera l'étoile qui fera rayonner la brillante Mounira ( textuellement la lumineuse en Arabe) Chatti.

L'auteure.
-Mounira Chatti est tunisienne. Bac en poche, elle est venue étudier à Aix-en-Provence où elle a obtenu un doctorat en littérature comparée. Elle se distingue dès lors par le thème de sa thèse : « L'écriture de la déportation et de la Shoah ou la double impossibilité : entre le silence et le dire ». Maître de conférences à l'Université de la Nouvelle-Calédonie, elle a mené de nombreux travaux sur les littératures post-coloniales (arabe, océanienne, africaine...).

Lire aussi l'interwiew de l'auteure.

Sur le Salon du livre de Paris
--Dédicace au stand de l'outre-mer (Nouvelle-Calédonie) le vendredi 13 mars 2009 à 15h
--Au stand des Éditions L'Amandier, lecture du roman par la comédienne Frédérique Wolf-Michaux, le dimanche 15 mars à 11h30.


Sites web:
--Éditions l'Amandier : www.editionsamandier.fr/f/index.php?sp=liv&livre_id=240
--Salon du livre : www.salondulivreparis.com



Par Fanny Tell

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