Interview de Steve Suissa - Mensch

Le réalisateur de Mensch explique ce qui l'a amené à réaliser ce film sur ce qu'est 'être un homme bien'. 'Peut-être que c'est ça qui est le plus difficile : résister, tenir, respecter certaines valeurs'



Comment est né le désir de réaliser 'Mensch' ?

Depuis des années, je travaille sur un biopic intitulé 'Victor Young Perez', que j'ai écrit avec Stéphane Cabel. C'est un projet très ambitieux et difficile à monter, donc mes producteurs m'ont conseillé de réaliser d'abord un film plus modeste.

J'ai tout à fait compris qu'un film cher ne pouvait pas se monter sur mon nom, surtout que le dernier que j'avais réalisé était un film de commande. Donc, il fallait impérativement que je réalise quelque chose qui me soit proche, que j'aille chercher en moi, que je retrouve mes racines.

J'avais depuis longtemps l'idée de faire un film sur ce que raconte 'Mensch', c'était dans mon inconscient.

Vous avez mis en scène 'Mensch' neuf ans après votre premier film 'L'envol'. Qu'est-ce qui a changé en vous ?

Je constate que, neuf ans plus tard, je me pose les mêmes questions, mais autrement. Je suis passé du jeune homme à l'homme. Je suis papa, donc je ne me réveille plus et je ne m'endors plus comme avant. Je suis moins insouciant, moins idéaliste, j'ai gagné en maturité. Pour résumer, 'L'envol' racontait ce que je voulais devenir, et 'Mensch' ce que je crois être devenu.



C'est un film sur un quartier, mais pas un film communautaire...

Cette communauté est souvent décrite sur un ton de comédie, parce qu'elle est marrante à caricaturer dans ses excès. Ici, j'ai tenu à ce qu'elle soit vraie.

C'est avant tout un film sur des gens qui prennent leur destin en mains, qui se bagarrent avec leur vie. Etre un 'Mensch', c'est avoir une certaine idée de ce que c'est, être un homme bien. Etre digne, ne pas se
plaindre, ne pas être un enfant gâté.

Sam doit faire face aux questions de son fils, il ne peut plus gruger avec la vie, tricher, se défiler. Pour son fils, il va devoir affronter, assumer. Alors il se demande ce que c'est, de nos jours, être un homme bien. On le lui a dit dans son enfance : c'est avoir une dignité, une éthique, se forcer à garder des valeurs, des principes, une priorité qui est le respect des autres.



Mais lui, il voit ce qu'est le monde aujourd'hui, un monde où ce que les gens respectent par-dessus tout c'est l'argent, le pouvoir. C'est un anti 'Scarface', ce film.

J'espère qu'on ira dans les banlieues, pour débattre et dire aux jeunes qui vivent là : 'Peut-être que c'est ça qui est le plus difficile : résister, tenir, respecter certaines valeurs'. Aujourd'hui, on ne te respecte que si tu pèses lourd. Je ressens ça aussi, dans le cinéma. Je suis confronté à la même dialectique. Est-ce que je dois faire des trucs qui ne me ressemblent pas, et aller vers l'argent, ou bien essayer de faire quelque chose de personnel, qui me ressemble, quitte à ce que ce soit plus long et plus compliqué ?

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