Décès de l'artiste franco-américaine à New York à l'âge de 98 ans
La sculptrice franco-américaine Louise Bourgeois, figure majeure de l'art contemporain, est décédée lundi 31 mai 2010 à New York à l'âge de 98 ans. Au cours de sa longue vie, Louise Bourgeois n'a cessé de renouveler son langage artistique. Emblème de toute une génération féministe, artiste inclassable, elle laisse une oeuvre protéiforme : des araignées géantes en acier, des installations ('La destruction du père'), des sculptures-objets ('Cellules'), des silhouettes de bois monolithiques (Depression woman'), des pièces mêlant les matériaux ('Janus fleuri'), des ' femmes-maisons'. Grâce à la sublimation artistique, Louise Bourgeois invite le spectateur à jouir de la transformation de l'angoisse ancienne en plaisir esthétique présent.
Rendez-vous le 4 juin prochain pour une exposition à Venise.

'L'art est une garantie de santé mentale.' Louise Bourgeois
C'est peu dire que l'oeuvre de Louise Bourgeois plonge dans l'inconscient, aux racines mêmes de la psychanalyse. Au centre: le sexe, dans toute son ambivalence, son ambiguité, ses cortéges de fantasmes, ses représentations monumentales conjuguées au fil des recherches techniques, des nombreux matériaux utilisés par l'artiste. Et puis le père, la mère, les conflits et les traumatismes familiaux, les secrets et les peurs d'enfance. Les sources d'une inspiration protéiforme pour des oeuvres à la troublante magie.
Louise Joséphine Bourgeois nait à Paris le 25 décembre 1911 de parents propriétaires d'un atelier de restauration de tapisseries à Choisy-le-Roy, dans la banlieue parisienne. Dès l'âge de dix ans, elle commence à aider ses parents pour les dessins des tapisseries. Après avoir obtenu son baccalauréat en 1932 au lycée Fénelon, elle étudie les mathématiques supérieures à la Sorbonne en géométrie, espérant trouver ainsi un ordre et une logique dans sa vie. Puis, elle étudie dans plusieurs académies d'art et suit les enseignements de Paul Colin, André Lhote, Roger Bissière, Gromaire et Fernand Léger qui l'aidera à s'orienter vers la sculpture.
En 1938, elle épouse l'historien d'art américain Robert Goldwater et part vivre à New York. Elle rencontre Joan Miro, Marcel Duchamp et André Breton. Elle présente sa première exposition personnelle en 1945. Elle expose des gravures et des peintures et entreprend de sculpter de longues silhouettes de bois.
Devenue américaine en 1951, mère de trois enfants, elle continue à exposer aux Etats-Unis, et commence à enseigner dans diverses institutions.
Ce n'est qu'à la fin des années 70 et l'apparition d'oeuvres de plus en plus violentes, comme 'La destruction du père' ou 'Confrontation', que Louise Bourgeois accède à la notoriété. Elle acquiert alors un atelier à Brooklyn, est élue membre de l'American Academy of Arts and Sciences à New York, et multiplie les expositions personnelles dans les années 80.

En 1982, à l'âge de 71 ans, elle devient la première femme à être honorée d'une rétrospective au Museum of Modern Arts (MoMA), à New York.
Dans les années 90, la sculptrice, finalement reconnue par son pays natal avec une grande rétrospective au Musée d'art moderne de la Ville de Paris en 1995, suscite un vif intérêt chez les Européens qui multiplient les expositions et les installations de l'artiste : Londres (1996), Bordeaux (1998), Biennale de Venise où elle est l'un des deux lauréats en 1999, à nouveau Londres en 2005, puis Bruxelles.
En 2008, Paris lui rend hommage à son tour, avant, de nouveau, New York, Los Angeles et Washington. Plus de 200 oeuvres, sculptures, installations, peintures et dessins, retracent le travail de cette artiste dérangeante et émouvante, intrigante et fascinante au Centre Pompidou.
En 2010, la Fondation Emilio e Annabianca Vedova s'apprête à inaugurer vendredi 4 juin à Venise l'exposition d'oeuvres inédites de l'artiste intitulée 'Louise Bourgeois. The Fabric Works' sur laquelle elle 'est intervenue activement, jusqu'à il y a deux jours', a indiqué son président Alfredo Bianchini, tout en
saluant en Louise Bourgeois 'l'une des figures les plus grandes et les plus significatives du panorama artistique de notre époque'.
Inspirée, tout au long de sa vie, par la magie mais aussi par les drames de l'enfance et de
l'intime, Louise Bourgeois laissera l'empreinte d'une femme et d'une artiste résolument
libre.
Bibliographie sélective
Textes de Louise Bourgeois
- Destruction du père, reconstruction du père. Ecrits et entretiens, 1923-1997, édition française, Lelong éditeurs, 2000
- « Freud's Toys », Artforum, New York, avril 1992
- « A project by Louise Bourgeois : Childs Abuse », Artforum, New York, déc.1982
Sur Louise Bourgeois
- Louise Bourgeois, catalogue de l'exposition, collaboration entre la Tate Modern et le Musée national d'art moderne, Centre Pompidou, édition française, 2008, sous la direction de Marie-Laure Bernadac et Jonas Storsve
- Marie Laure Bernadac, Louise Bourgeois, La création contemporaine, Flammarion, 2006 / première édition, 1995
- Jacqueline Caux, Tissée, tendue au fil des jours, la toile de l'œ,uvre de Louise Bourgeois, Seuil, 2003
- Robert Storr, Paulo Herkenhoff et Allan Schwartzman, Louise Bourgeois, Phaidon Press Limited, Londres, 2003 / édition française, 2004
- Marie-Laure Bernadac, Louise Bourgeois Pensées-Plumes, catalogue d'exposition, éditions du Centre Georges Pompidou, Paris, 1995
- Louise Bourgeois : Sculptures, environnements, dessins, 1938-1995, catalogue d'exposition, Musée d'art moderne de la Ville de Paris, édition de la Tempête, Paris, 1995, sous la direction de Suzanne Pagé et Béatrice Parent.
Revues
- Art Press, n°175, décembre 1992
- Louise Bourgeois, un langage très personnel
- Louise Bourgeois - DVD Arte video
- Louise Bourgeois
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