Les uns la rejettent au nom de la liberté, les autres la revendiquent au nom de la liberté... aussi.
Le lancement de la campagne de l'European Women Lobby contre la prostitution : Ensemble pour libérer l'Europe de la prostitution à l'aide d'un spot choc décliné en 21 langues et d'un slogan : 'La prostitution n'est pas ce que vous pensez...' permet de rouvrir un débat aussi vieux que le plus vieux métier du monde, comme il est d'usage de le désigner (justifier ?)...
Dans le même temps, plus près de nous, jeudi 2 juin, quelques 200 prostituées, clients et membres d'associations manifestaient à Pigalle, à Paris, à l'appel du collectif Droits et Prostitution pour dénoncer le rapport parlementaire Bousquet qui propose d'incriminer les clients ayant recours aux services de prostituées pour lutter contre le commerce de l'acte sexuel.
Et en avril dernier, je me souviens m'être interrogée en entendant Elisabeth Badinter, réputée féministe, s'insurger sur France Culture contre toute entrave à la prostitution... en revendiquant le droit à disposer librement de son corps. L'idée de liberté réelle est utopique, mais la sexualité gratuite ou payée relève, à mes yeux, de la décision de chaque femme ou de chaque homme.
Pour être franche, je me suis énervée... Il est vrai que la dame en question m'énerve passablement. J'avais déjà piqué une (petite) crise à la lecture de son dernier opus Le conflit, la femme et la mère (éd. Flammarion), où en un mot comme en cent, elle estime que les enfants sont des super boulets et les femmes qui allaitent des super connasses.
Elle n'envisage même pas un instant le jonglage et les impératifs périlleux des vies quotidiennes, professionnelles et cie auxquelles nous devons faire face, bon an mal an comme tout être humain que nous sommes, avec ma foi bien des soucis mais bien des bonheurs aussi !
Accessoirement, ce genre de raccourci me fait penser à la réflexion récente de copines estimant que c'était une drôle d'idée que d'acheter des steaks hachés dans un supermarché discount (en référence à l'épidémie qui sévit dans le Nord), et que de toute façon, manger de la viande n'était pas nécessaire pour avoir une 'bonne' alimentation.
Sauf que... on n'a pas toujours le choix (surtout économique), et que l'on est libre de manger ce que l'on veut jusqu'à preuve du contraire.
Effectivement : sauf que... l'exercice de la prostitution (des hommes, des femmes, des enfants) ne relève pas forcément d'une libre décision, rarement d'ailleurs. Misère psychologique, économique, abandon familial, isolement, désespoir, faiblesse et bien entendu proxénétisme et violence, sont autant de 'bonnes' raisons de faire commerce de son corps, et souvent dans des conditions particulièrement dégradantes. Et comment conjuguer liberté et prostitution, à moins de ne l'avoir soi-même pratiqué ?!
La vérité n'est jamais unique, comme la liberté d'ailleurs. Par contre, il est fondamental, pour les clamer et les revendiquer, de les envisager dans la totalité de leur contexte, et surtout dans toute leur complexité.
Or, ces contextes et cette complexité sont souvent humbles, trop peut-être pour être dignes du regard d'experts éclairés. A l'image de leurs victimes d'ailleurs...
Au sujet du débat actuel sur la pénalisation du commerce de l'acte sexuel, Nicole Nepton m'a suggéré de prendre connaissance d'un rapport récent sur les effets pervers de la criminalisation des clients en Suède.
isa !
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