Avec Madeleine Dubois dans les coulisses de la campagne

Où sont les femmes ?

Madeleine Dubois qui se présentait aux Elections Sénatoriales le 25 septembre en Haute-Loire n'a pas été élue. Nicole Chassin non plus. Exit les femmes !


Madeleine Dubois

Il y a le prestigieux Palais du Luxembourg et ses ors. Il y a aussi le quotidien sur le terrain. Nous avons accompagné une candidate dans les coulisses d'une campagne dans la France profonde.

Madeleine Dubois qui se présentait aux Elections sénatoriales le 25 septembre dernier en Haute-Loire n'a pas été élue. Nicole Chassin non plus. Exit les femmes !

Les grands électeurs ont préféré deux hommes dont le sénateur sortant Jean Boyer, 75 ans (soit 81 ans à la fin de son mandat). Le lendemain de son élection, celui-ci annonçait déjà son intention de démissionner dans 3 ans laissant ses électeurs interloqués. Comprenne qui pourra!


80 sénatrices samedi, 77 seulement dimanche



« Si le Sénat a pris un tournant historique ce dimanche 26 septembre en basculant à gauche, il n'a pas engagé celui de la parité », commentait lundi le Parisien. Ce renouvellement partiel du Sénat a permis l'élection de 49 femmes seulement sur 170 candidates. Elles étaient 80 à la veille du scrutin, elles ne sont plus que 77 aujourd'hui. La proportion de sénatrices stagne à 22% contre 78% pour les hommes (266). Malgré la loi sur la parité du 6 juin 2000 qui doit favoriser un égal accès aux fonctions législatives pour les hommes et les femmes.

En réalité, « les dirigeants des partis ont déployé des trésors d'imagination pour contourner l'obligation paritaire dans ce scrutin proportionnel », assurent les organisations féministes.


Journée d'élections au Puy

Elections au Puy

Dimanche 25 septembre. Journée d'élections au Puy, préfecture de la Haute-Loire. Une belle journée d'automne ensoleillée. Du haut de son promontoire, la vierge de fer veille sur la ville. Côté République, les drapeaux tricolores hissés sur les grilles de la préfecture ont belle allure. Dans la cour, il y a foule. Les quelque 700 grands électeurs qui votent aux sénatoriales sont tous là. Le vote est obligatoire. Voir la démocratie en train de se faire a quelque chose d'émouvant, d'éminemment respectable. Tant de pays dans le monde vivent sous des dictatures.


Où sont les femmes ?

En approchant, une impression curieuse : où sont les femmes ? Elles sont quelques unes quand même. 10% du public? Peut être un peu plus. Renseignements pris, il y a quelques électrices, des maires ou adjointes, une poignée, deux candidates. Les autres accompagnent qui un mari, qui un père, un ou une amie.

Pas étonnant quand on sait que les partis respectent si peu les règles de parité qu'ils ont eux même votées. Très peu de femmes ont été investies par leur parti et, le plus souvent, comme suppléantes, à leur juste place en somme, celle de numéro deux! Et la très grande majorité des maires et délégués qui constituent le corps des grands électeurs sont des hommes.

Madeleine n'a pas été soutenue par l'UMP

On se salue, on se congratule, on s'interroge, on se pose des questions naïves qui restent sans réponse. Tel grand élu du département aurait-il donné des consignes de vote dans les derniers jours ? Non... Comment et pourquoi un article diffamatoire sur l'un des candidats a-t-il pu être publié et circuler sous le manteau dans le département ? Comment sont financées les campagnes ? Qui paie les déjeuners, remises de décorations et autres frais ?

Les Sénatoriales constituent le seul exemple en France d'une élection au suffrage indirect. Avec un mode de scrutin d'une extrême complexité qui ne facilite ni la compréhension ni la transparence et suscite toutes sortes d'interrogations. Y compris des grands électeurs eux-mêmes. Beaucoup semblent désemparés. Quand on doit gérer une petite commune rurale d'une centaine d'âmes, les soucis en tous genres sont un pain noir quotidien. Alors les méandres du scrutin vous dépassent. Et les pratiques de la haute et la basse politique encore plus !


La seule élection nationale sans comptes de campagne

Ces élections présentent aussi une autre particularité : ce sont les seules à ne pas être soumises à des « comptes de campagne » contrairement aux élections législatives. Soit à des règles et une surveillance très précises des fonds mis à la disposition des candidats et de leurs dépenses. La moindre des choses puisqu'il s'agit de fonds publics. Madeleine Dubois ne mâche pas ses mots : 'Il n'est pas normal qu'au XXIe siècle le Sénat échappe aux règles élémentaires d'égalité des candidats devant le scrutin. Je déplore que pour une élection de cette importance, puisqu'il s'agit d'un mandat national, il n'existe pas de comptes de campagne. Cette anomalie permet tous les apports et promesses de crédits sans aucun contrôle ni transparence.' Le Sénat semble désormais vouloir y mettre bon ordre.


L'UMP n'a plus de sénateur en Haute-Loire

Autre bizarrerie pour le non initié, Madeleine Dubois, UMP, n'a pas reçu l'investiture de son parti qui a préféré apporter son soutien à deux autres candidats d'un autre parti centriste. Pourquoi ? Résultat en tout cas : l'UMP a perdu un siège et n'a plus de sénateur dans le département de la Haute-Loire.

Quant à elle, elle a financé sa campagne sur ses deniers personnels tandis que certains de ses concurrents bénéficiaient de fonds de leur parti dont nul ne connaitra sans doute jamais le montant.

Avant de suivre cette élection j'essayais de lutter contre l'idée caricaturale d'un Sénat vieillot et conservateur peuplé de notables à la Daumier. J'en ressors convaincue que son mode de scrutin anachronique ne facilite pas le fonctionnement d'une démocratie moderne, transparente et efficace. Pire, que certaines pratiques politiciennes, l'absence de comptes de campagne et le non respect de la parité font régner une suspicion de petits arrangements entre coquins. Au risque de nourrir le populisme antidémocratique. C'est en tout cas le sentiment qu'exprimaient certains électeurs dimanche soir.

Pour Le collectif Osez le féminisme, la parité réelle au sein des élus doit passer par une législation plus stricte. « Par l'instauration du non cumul strict des mandats, l'obligation de la parité au niveau des têtes de listes et la suppression de toutes les subventions publiques aux partis politiques qui ne respectent pas la parité. »

Réjouissons nous quand même, les femmes viennent d'obtenir le droit de vote en Arabie saoudite. Mais elles ne pourront toujours pas conduire, voyager ou travailler. Allez, vive les femmes quand même !

Par Gisèle Prévost

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