L'amour, la mort: le sens de la vie

Fanny Ardant nous parle de la mort dans l'année de la pensée magique au théâtre de l'atelier. Jacques Gamblin évoque l'amour dans Tout est normal, mon coeur scintille, au théâtre du Rond-Point. Tous deux mettent en scène la mort, l'amour, la vie, de façon tragique ou décalée mais surtout avec intériorité, retenue et profondeur.




L'année de la pensée magique

Une femme entre en scène. Elle raconte très précisément avec calme, méthode et émotion maîtrisée, ce qu'elle a vécu. Le pire, perdre les êtres qu'on aime. « La vie change vite. La vie change en un instant. On s'apprête à dîner et la vie telle qu'on la connait s'arrête. »

Son mari meurt d'une crise cardiaque. Sa fille est depuis quelques temps dans le coma. Elle va se réveiller puis retomber dans le no man's land de la vie. Mais elle, l'épouse et la mère, ne se laisse pas aller. Ce n'est pas le genre de femme qui s'abandonne, non elle maitrise et tant qu'elle maitrise soi, les autres, la maladie, elle maitrise le cours de la vie même envers et contre la mort.

Elle « prend toutes les dispositions », fait ce qui doit être fait, semble accepter l'épreuve ultime mais ce n'est qu'une façade. Au fond elle s'invente des subterfuges, des superstitions, parce qu'ainsi, elle peut garder au fond d'elle, l'impossible : la pensée que son mari revienne un jour.


Fanny Ardant marche dans le décor sobre et remplit l'espace de sa voix si particulière, des mots de la vie de Joan Didion. Le texte est très fort parce qu'il est simple, il raconte le moindre geste, impression, silence, que l'écrivain a ressenti, vécu, expérimenté de toute ses fibres.
Pas de cris, pas de mots plus hauts que d'autres, mais une intériorité si forte qu'elle va droit au cœ,ur des spectateurs. Fanny Ardant, alias Joan Didion, décrit la mort de tout être cher et de ce que notre pensée imagine et construit pour tenir debout et continuer à vivre différemment.

Un monologue tragique, mis en scène avec sobriété qui reste en tête, bien après que les spectateurs aient quitté le théâtre après avoir ovationné debout la comédienne.



'Tout est normal, mon coeur scintille.'


Au Rond-Point, la grande salle est pleine à craquer. Le plateau est dans le noir. Un halo de lumière, une main apparait à l'intérieur. Elle cherche , elle cherche la femme aimée, envolée, partie, laissant sa moitié désespérée, délirer.

L'amoureux quoi qu'il fasse, qu'il pense, revient à elle. Et il en pense des choses!! Mon dieu qu'il est difficile de parler de façon cohérente et simple de ce spectacle. Impossible de le décrire tant la pensée de l'auteur virevolte, passe d'une idée à l'autre, de la plus bizarre à la plus simple. Mais au fond il n'en a vraiment qu'une: son amour pour l'autre.

photo Giovanni Cittadini Cesi

Vu comme ça, le spectacle n'est pas drôle. Faux, il est hilarant par moments, poétique par d'autres, émouvant aussi. C'est un tout incroyable, qui ne ressemble à rien d'autre qu'à son auteur.
Mais est-ce le top modèle qui s'est inspiré de la girafe ou l'inverse? Après avoir vu la séance d'ostéopathie, vous hésiterez à consulter...Ce petit bonhomme mince, presque fluet, occupe lui aussi l'espace de ses délires si touchants sur le coeur qui est non pas à gauche 'mais au centre!'.

Giovanni Cittadini Cesi

Un couple de danseurs, lui en double, en couple, accompagne Jacques Gamblin dans des pas de deux ou de trois, sensuels, délicats, aériens, emplis d'énergie vitale.

Le spectacle est magique, ne ressemble à rien, ne se refuse rien, pour affirmer encore et toujours que la vie c'est l'amour.


Théâtre de l'Atelier 01 46 06 49 24

Théâtre du Rond-Point, jusqu'au 3 décembre



Par Veronique Guichard

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