Tests cosmétiques entre autruche et dinde

Chers amis de la cosmétique, n’allez surtout pas croire que je trouve vos recherches et vos réalisations farfelues. J’ai trop rencontré de chercheurs et de formulateurs passionnants pour le penser. Ceci dit en préambule, pourrait-on en finir avec ces « produits dûment testés à l’efficacité prouvée » ! Parce que tout de même, c’est intelligent une femme, même sous influence de vos pubs et de votre mass marketing.

« Produit testé en laboratoire… ? Encore heureux ! Et du reste obligatoire en vertu de la loi. Le principe de base des lois qui régissent nos cosmétiques est primum non nocere. Autrement dit : d’abord ne pas nuire. Concurrence et fabrication à l’échelle industrielle et internationale obligent, de nombreuses marques en font même plus que le minimum syndical. Alors les tests en laboratoire, comment s’y prend-on et que nous assurent-ils au final?

Il y a d’une part les tests classiques d’innocuité, de stabilité et autres, réalisés dans les laboratoires propres aux marques. C’est la routine. La plupart doublent ces résultats par des tests dans des laboratoires ou sociétés de tests externes supposés assurer l’indépendance des résultats. Et là, c’est un peu plus flou. Pourquoi ? Déjà parce que ces tests sont rémunérés et cela peut aller jusqu’à 150 € pour certains. Un vrai business. Certes, normalement il est interdit d’accepter de tester deux produits différents en même temps. Mais enfin bon…pas si mal pour arrondir les fins de mois d’autant qu’ils ne sont pas souvent contraignants. Il existe même des formules où vous recevez les produits par courrier. Vous remplissez alors de chez vous les formulaires qui les accompagnent pour noter ce que vous observez après une application matin et soir. En principe. Sauf que par principe personne ne va vérifier que les produits ont bel et bien été appliqués deux fois par jour, ni même que vous n’en testez pas un autre d’un autre laboratoire en même temps. Ni même si vous avez jamais essayé le produit et, qui plus est, selon les règles de quantité et d’hygiène requises. Dans d’autres cas vous êtes convoqués à intervalles réguliers pour mesurer l’effet souhaité : estompe des rides, hydratation, éclat de la peau etc.

Un ami ayant travaillé dans une importante société de tests me confiait cet amusant constat :

« lorsque les testeurs reviennent nous voir pour que nous puissions évaluer l’efficacité du produit (dont le nom ni la marque ne sont jamais précisés), c’est fou ce qu’on voit de personnes se rendre aux toilettes ».

Effet diurétique ? Effet d’un stress quelconque ? Non, non, c’est juste que les testeurs doivent rapporter le pot ou le tube lors du contrôle et que celui-ci se vide facilement dans les toilettes pour prouver qu’on a bien suivi le traitement jusqu’au bout… même si on l’a essayé à temps très partiel.

Et ce n’est pas tout. Au service marketing on a mis toute son énergie à défendre ce nouveau produit miracle. Alors s’entendre dire par une société externe que, bof, finalement, ça ne marche pas si bien que ça, c’est un peu se tirer une balle dans le pied. Sauf bide total, quand même assez rare, on choisira d’autres critères pour une étude complémentaire. Des critères permettant au marketing de sélectionner ce qu’il y a de plus flatteur, de plus convaincant et de plus positif. Disons que les trois quarts des discours sur l’efficacité du produit sont influencés par le marketing et la communication et nous ne sommes pas loin de la vérité. Efficacité prouvée. CQFD

 

Evelyne Dreyfus

Ajouter un commentaire